Bonjour à tou-te-s !
Votre humble serviteuse vous propose de découvrir 5 contes. 5 contes que vous ne connaissez peut-être pas et mis à l’écrit par Marie-Jeanne L’Héritier, une de ces femmes qui ont beaucoup fait -et pour certaines qui en ont même initié la mode- pour les contes de fées écrits.
L’idée de cet article m’est venu à la fin de mon Master 1, quand il a fallu expliquer mon sujet à mon entourage non-universitaire. Ayant travaillé sur 5 contes différents, il est compliqué à chaque fois d’expliquer l’histoire de chacun pour en revenir à ma problématique sans perdre mon auditeur au passage.
De plus, Marie-Jeanne L’Héritier se place dans une optique très Précieuse et ses contes peuvent donc être très difficile à appréhender quand on est plus habitué au côté populaire de Grimm ou de Perrault (dont elle est par ailleurs la nièce). Pour autant ils sont très intéressants et beaucoup des thèmes abordés sont passionnants à observer avec notre œil du 21ème siècle ! Vous allez me dire que je prêche pour ma paroisse mais je vous assure que si vous la connaissiez un peu mieux elle vous plairait.
MAIS je sais que tout le monde n’a pas le temps (ou la patience) de lire un conte plutôt long avec pas mal de détour et d’ornements ! C’est pourquoi je vous propose ces petits résumés pour, peut-être, vous donnez envie, ou au moins vous faire connaître des choses nouvelles ! Et comme c’est un peu long, je vais diviser le tout en plusieurs articles !
Aujourd’hui je vous parlerais de Marmoisan ! Et oui j’ai choisi comme photo de couverture Brienne parce que quand on me parle d’une femme guerrière badass de fiction elle est l’une des première à me venir à l’esprit.
Léonore est une jeune fille intelligente, jolie et active qui fait la fierté de son veuf de père, le comte de Solac. Il faut dire que le pauvre homme se console comme il peut, il a trois autres filles qui sont un désastre ; entre l’acariâtre qui ne veut pas se marier (vous vous rendez compte ?!), celle qui a le vice du jeu et celle qui a des mœurs discutables, il se console avec sa petite Léonore qui elle est un modèle à tous les niveaux. Par mesure de sécurité il a même mis la dernière sœur, Ioland, dans un couvent pour être sûr qu’elle ne tourne pas mal. 2 filles convenables pour trois désastreuse, vous me direz que c’est une bonne moyenne. Mais pour compléter le tableau, rajoutons que Léonore a un frère jumeau ; Marmoisan. Bien qu’ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau, il a beaucoup de défaut mais comme c’est l’unique garçon, son père l’aime beaucoup.
Mais comme dans tous les paisibles royaumes, la paix ne dure pas ; La guerre éclate et Marmoisan est appelé à la guerre, pour le plus grand désespoir de son père qui ne veut pas perdre son fils unique chéri. Fils qui lui est d’un naturel orageux et bagarreur donc la guerre ça ne le dérange pas.
Mais le destin est joueur. Marmoisan est un grand harceleur dragueur et il a jeté son dévolu sur une femme malheureusement mariée. Elle s’est plusieurs fois refusée à lui mais il n’a pas dit son dernier mot. Une nuit que le mari est absent, il se faufile jusque chez elle et essaye d’escalader le mur puis la fenêtre pour rentrer… Et il tombe. Et meurt sur le coup. Voilà.
Bon autant vous dire que le comte de Solac fait un peu grise mine, surtout que Marmoisan devait aller à la guerre. Et avouer la mort de son fils parce que son dernier a voulu embêter une pauvre femme quand le mari avait le dos tourné ça le fait moyen. Il est donc décidé que Léonore, qui, on le rappelle, est la copie physique de son frère, prendra sa place. Nous l’appellerons donc comme ça à partir de maintenant. Ça tombe bien, elle sait se battre et se plier aux règles de la cour à la perfection. On sort également la toute jeune Ioland de son couvent pour la seconder dans cette périlleuse mission.
La perfection de ce Marmoisan 2.0 attire l’attention de toute la cour et en particulier du prince qui s’émeut de voir un jeune homme si parfait. Cet attirance se confirmera tout au long du conte et le prince va même déplorer que Marmoisan ne soit pas une femme pour pouvoir la courtiser.
Parallèlement on a affaire à une suite d’événements guerriers durant lesquelles Léonore Marmoisan s’illustre avec brio. Elle sauve même la vie du prince à plusieurs reprises et surpasse de très loin tous les autres soldats.
Cela ne plait pas à tout le monde, en particulier un certain comte de Riverol qui va chercher par tous les moyens à discréditer Marmoisan.
Ca tombe bien parce que malgré sa perfection, Marmoisan reste une femme et Marie-Jeanne notre autrice nous le fait bien remarquer. Elle finit par attirer la méfiance sur son sexe car elle est… trop soigné. Elle lave son linge et en prends grand soin et ça c’est pas considéré comme très viril par les autres soldats.
Cela agace la jeune fille travestie qui se fait une réflexion que je trouve très intéressante :
«Que la férocité des hommes est grande! Disait-elle, et qu’ils en sont bien convaincus eux-mêmes, puisqu’un peu de douceur et de retenue est capable de leur faire entrevoir que je ne suis pas de leur sexe ! Si l’on m’avait vu jurer, assommer mes valets, ne parler jamais de la divinité qu’en blasphémant, boire avec des excès honteux, on n’aurait pas douté que je ne fusse un homme; et je ne me trouve dans le cruel chagrin où je suis que pour avoir vécu avec trop de règle; mais quand je devrais encore souffrir davantage, je ne puis me résoudre à vivre d’une manière extravagante, quel que soit l’habit que je porte; car, excepté les airs effarouchés et libertins, n’ai-je pas agi comme font les hommes?»”
Malgré les soupçons, sa bravoure et son courage vont finir par écarter le discrédit, en particulier lorsqu’elle sauvera une jeune fille d’un viol après une bataille. Le prince quant à lui se désespère toujours d’amour et la guerre va finir par se conclure.
L’armée rentre donc à la cour et on célèbre le retour des braves guerriers avec un tournoi et des jeux.
Et là c’est le drame. Lors d’une joute toute bête Marmoisan est blessée. On doit donc la soigner et son sexe est révélé aux yeux de tous.
Et là et bien tout se termine bien ; Marmoisan redevenue Léonore peut enfin redevenir femme et quitter l’habit guerrier. Le prince lui peut enfin lui faire la cour. Ils finissent par se marier puisque Léonore/Marmoisan se rend finalement compte que le petit homme est pas si mal que ça.
Ioland, la sœur de Léonore qui l’a aidé tout du long se marie aussi et leur père est heureux.
Et les autres sœurs ? Elles finissent au couvent et/ou vieilles filles…
The end!
Petites notes :
-Le déroulement vous paraît peut-être très différent de ce que vous connaissez et en effet, la structure classique du conte semble plutôt laisser place à une version plus romanesque avec plus d’intrigues et de sous intrigues, l’absence d’un grand opposant….
-Ce conte fait partie des plus connus de L’Héritier (avec Finette) et on peut en trouver des traces jusqu’au 19/20e siècle. Il est également beaucoup étudié, notamment par le prisme du travestissement et du rapport au genre. Si la question vous intéresse ou même si vous voulez en savoir plus sur ce conte, ses variations et ses enjeux, je vous conseille l’ouvrage de Catherine Vellay-Valantin, La fille en garçon.
-Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le travestissement sous l’Ancien Régime n’est pas quelque chose de rare en réalité. Je vous conseille l’ouvrage de Sylvie Steinberg intitulé La Confusion des sexes. Le travestissement de la Renaissance à la Révolution, avec un bon nombre de cas étudiés et des ressources rassemblées et bien organisées autour de différents thèmes lié au sujet du travestissement !
-Avec ce conte on explore réellement les clichés liés au genre ( classique et très binaire, féminin ou masculin) et ce qui en découle. Si au premier abord on peut voir Marmoisan comme un récit de l’émancipation à travers le travestissement, on se rend vite compte que les stéréotypes communément admis chez l’homme et la femme sont renforcés et parfois même mis en avant comme positifs par L’Héritier. L’homme est par nature violent et moqueur alors que la femme sera toujours amenée à la superficialité et l’exagération dans le soin qu’elle porte à ses affaires…
Je vous écris tout ça sans avoir mes notes sous les yeux alors n’hésitez pas à poser des questions et je reviendrais approfondir si besoin !
Dans tous les cas je pense consacrer un article réellement centré sur les problématiques que j’ai abordé dans mon mémoire et il sera surement plus scolaire et moins…fouilli.
Sur ce, bonnes vacances et See you nara !
Le Blabla non organisé de Cofee 
Laisser un commentaire